La montagne, du sublime au pittoresque (fin XIXe siècle, début XXe)


1. LE DEVELOPPEMENT DU TOURISME.


    A la fin du XIXe siècle et au début du XXe, les récits et les images changeront à nouveau d’objet : il s’agira de  donner envie aux habitants de se promener, et les récits deviendront davantage touristiques, notamment, par exemple, avec Jules Hermann et son “Guide du voyageur pour le canton de Saint-Pierre”, qui paraîtra en 1923.
Et très progressivement, le paysage de montagne passera du sublime au pittoresque, en s’attachant notamment aux formes particulières rencontrées dans la nature, aux monuments naturels. La première loi sur le paysage, en 1906, sur la protection des “monuments naturels”, traduira bien cette nouvelle sensibilité.

Dans les cartes postales anciennes de l’île, prise au tournant du XIXe et du XXe siècle, l’attention aux monuments naturels et aux progrès techniques se remarque très bien. Les paysages agricoles sont là encore absents, alors que les routes et les ponts sont photographiés inlassablement.

Le monument naturel que l’on pourrait qualifier d’archétypique est le sommet dit “du Peter Booth” sur la route de Cilaos, maintes fois représenté en cartes postales, avec son étrange forme en pointe isolée, et plus généralement toute la chaîne du Peter Booth, qui court du Bonnet de Prêtre au Piton Fougères en passant par le Gros Morne de Gueule Rouge et qui sépare le cirque de Cilaos en deux parties.
C’est cette mode du pittoresque qui a transmis jusqu’à aujourd’hui les rochers en chicots qui bordent la route du littoral vers Boucan Canot :

“Par une coquetterie d’artiste, M. Roux a, chaque fois qu’il l’a pu, laissé se dresser dans le ciel quelques rochers à pic qui, tout en attestant les efforts qu’il a fallu faire pour les isoler, laissent au Cap Champagne sa pittoresque apparence d’une forteresse féodale dont les tourelles éventrées se suspendent encore au dessus de l’abîme.” (P. de Monforand, Route du Littoral de Saint-Paul à Saint-Gilles, Album de la Réunion, T.4)