Ce schéma d'ensemble, même s'il est tendanciel, apparaît trop grossier pour saisir la réalité des paysages habités des pentes.
Des nuances apparaissent, héritées de l'histoire et de la géographie, qui contribuent fort heureusement à diversifier les paysages habités : tous les bas ne sont pas urbanisés, même si les paysages véritablement sans bâti, exempts de toute construction, proprement agricoles ou naturels, y sont devenus rares (de même tous les hauts ne sont pas « vierges », et la présence des îlets dans les cirques, fragiles radeaux perdus dans l'océan déchaîné des pentes, des remparts, des mornes et des pitons, marque l'émouvante présence des hommes : tout petits dans une nature grandiose et sauvage d'aspect).
Sur les pentes, l'organisation de l'urbanisation est double : un étagement d'une part, une alternance d'autre part. L'étagement correspond à des « strates » d'organisation du territoire en fonction de l'altitude. Les paysages des pentes diffèrent en partie par cette organisation étagée et ses variations. De façon très grossière :
les pentes du nord-est sont organisées en quatre étages : littoral urbanisé, pentes agricoles, mi-pentes habitées, hauts (forêt) ;
- les pentes du sud en trois étages : urbanisation littorale, espace agricole et urbanisation des mi-pentes, hauts ;
- les pentes de Saint-Philippe et de Sainte-Rose comptent trois étages : littoral plus ou moins urbanisé (RN 2), pentes agricoles, forêt ;
- les pentes de l'ouest, les plus longues, comptent au moins six étages principaux : littoral urbanisé, pentes littorales sèches ou irriguées, urbanisation des mi-pentes, espace agricole plus ou moins mité, urbanisation des hauts (route Hubert-Delisle), hauts (pâturages, forêts, branles) ;
- les pentes de Saint-Denis sont urbanisées en continu entre littoral et mi-pentes, de même que les pentes de Saint-Pierre – Le Tampon, ainsi que Le Port-La Possession ; pour ces pentes, l'étagement est donc d'une autre nature en trois ou quatre strates : plaine urbanisée, pente urbanisée, espace agricole (le cas échéant), hauts (forêt).
Il existe bien des nuances et des situations particulières. L'essentiel est de saisir la nature stratifiée de l'urbanisation, étroitement liée à ses espaces non bâtis, littoraux, agricoles ou naturels
A cette stratification (ou étagement) s'ajoute une alternance (ou séquençage), cette fois pour un même étage :- alternance de littoral construit et de littoral « naturel » : une alternance essentielle, qui garantit la lisibilité et l'existence même des villes et stations balnéaires successives, dans leur identité, et qui garantit également l'accessibilité au littoral, espace de liberté et aujourd'hui de loisirs ; ce jeu d'alternance est organisé aujourd'hui par les propriétés du Conservatoire du Littoral ou du Conseil Général et la Loi Littoral.
- alternance de pentes agricoles et de pentes urbaines : une alternance aujourd'hui fragilisée par le mitage et l'urbanisation linéaire qui tendent à noyer l'ensemble dans une émulsion généralisée ; c'est l'un des enjeux les plus forts du devenir de l'île en termes de paysage : savoir décanter cette situation, en organisant l'étagement et l'alternance à des échelles fines, en inventant une forme « d'agro-urbanisme ».
L'histoire du peuplement de l'île par les hommes permet de comprendre la situation actuelle, la constitution progressive des paysages urbanisés et de dégager leur typologie actuelle. Elle permet également de mesurer à quel point le phénomène urbain est puissant et récent. Cette histoire est largement liée aux infrastructures de transports et de déplacements.