A La Réunion, la gestion de l'eau s'avère délicate du fait d'une répartition naturelle très irrégulière, dans l'espace comme dans le temps :
- irrégulière entre est et ouest de l'île : pluviométrie moyenne à l'Est : 4 900 mm ; à l'Ouest : 1 300 mm,
- irrégulière entre les Hauts et les Bas : une eau de surface intermittente dans les Hauts et des nappes littorales pérennes dans les Bas,
- irrégulière entre les saisons : alternance de saison sèche et de saison des pluies.
Cette inégale répartition des précipitations dans l'île a entraîné, depuis le XVIIIe siècle, des travaux hydrauliques pour corriger les déséquilibres. Avec l'ère du sucre, des canaux d'irrigation gravitaires ont été créés : dérivation de la ravine à Marquet à La Possession en 1797, dérivation de la rivière Saint-Etienne en 1816, creusement du canal Lemarchand à Savanna en 1829, dérivation de la rivière du Mât en 1860, pour l'irrigation de la plaine du Champ Borne, qui devenait maraîchère. Les plus connus de ces canaux sont ceux de la ravine Saint-Gilles, qui ont un temps été parcourables à pied de façon ludique pour rejoindre les bassins (Bassin des Aigrettes, Bassin Malheur, Bassin Bleu), tantôt suspendus en bord de falaise, tantôt creusés en tunnels. Ils sont aujourd'hui fermés au public. Les anciens canaux constituent aujourd'hui de discrètes traces dans le paysage, rarement remises en valeur malgré la qualité des réalisations et les parcours confortables, quasi-horizontaux, qu'ils offrent.
A partir des années 1960-1970, l'irrigation devient majeure dans la politique agricole. Elle s'opère désormais par des canalisations enterrées. Ce sont moins les ouvrages qui marquent le paysage que les effets même de l'irrigation, capable de transformer des pans entiers de territoires, grâce à de grands périmètres à vocation régionale : Bras de la Plaine 5 500 ha, Champ-Borne 1 800 ha, Bras de Cilaos 3 400 ha.
A l'heure actuelle c'est l'Ouest qui, depuis quelques années, vit une profonde transformation de ses paysages avec l'irrigation des terres des mi-pentes et des bas. Les étendues sèches de savane plus ou moins arbustive cèdent peu à peu la place aux vertes étendues de canne à sucre. Le Conseil Général, avec des financements européens, met en œuvre l'ambitieux
projet ILO (irrigation du littoral ouest) de transfert des eaux pour irriguer l'ouest.