L’étagement et l’alternance sont des concepts essentiels pour l’organisation durable du développement des pentes de l’île. Ils ne sont pas nouveaux, mais ils méritent d’être consciemment maniés et réactivés dans le cadre des réflexions d’aménagement du territoire.
L’étagement correspond à des « strates » d’organisation du territoire en fonction de l’altitude. Par héritage naturel et culturel, les paysages des pentes diffèrent en partie par cette organisation étagée et ses variations. De façon très grossière :
les pentes du nord-est sont organisées en quatre étages : littoral urbanisé, pentes agricoles, mi-pentes habitées, hauts (forêt) ;
Il existe bien des nuances et des situations particulières. L’essentiel est de saisir la nature stratifiée de l’urbanisation, étroitement liée à ses espaces non bâtis, littoraux, agricoles ou naturels.
A cette stratification (ou étagement) s’ajoute une alternance (ou séquençage), cette fois pour un même étage :
- alternance de littoral construit et de littoral « naturel » : une alternance essentielle, qui garantit la lisibilité et l’existence même des villes et stations balnéaires successives, dans leur identité, et qui garantit également l’accessibilité au littoral, espace de liberté et aujourd’hui de loisirs ; autant que faire se peut, ce jeu d’alternance est organisé aujourd’hui par les propriétés du Conservatoire du Littoral ou du Conseil Général, la Loi Littoral, et plus ponctuellement par les conditions naturelles, géomorphologiques et volcaniques.
- alternance de pentes agricoles et de pentes urbaines : une alternance aujourd’hui fragilisée par le mitage et l’urbanisation linéaire qui tendent à noyer l’ensemble dans une émulsion généralisée ; c’est l’un des enjeux les plus forts du devenir de l’île en termes de paysage : savoir décanter cette situation, en organisant l’étagement et l’alternance à des échelles fines, en inventant une forme « d’agro-urbanisme ».
L’addition de l’étagement et de l’alternance pour organiser le développement des pentes de La Réunion constitue la matrice pour une « trame verte et bleue » telle que conceptualisée au Grenelle de l’Environnement.
L’ensemble conduit à concevoir les pentes de La Réunion comme un archipel d’îles urbaines au sein d’espaces agricoles et naturels protégés. Un schéma qui va à rebours de l’urbanisation linéaire observée jusqu’à présent, celle-ci tendant spontanément à la disparition même de cette organisation étagée et alternée. Il s’agit donc d’une politique nécessairement volontariste, susceptible de contrecarrer les processus tendanciels. Elle suppose d’autres formes de relations « ville-campagne », conceptualisées ci-dessous par « l’agro-urbanisme ».