Atlas des paysages de La Réunion




Accueil » DIAGNOSTIQUER ET AGIR » Les processus récents de transformation des paysages » Les dynamiques d’évolution : la puissance des transformations des 60 dernières années » 1.4. Les paysages de l’eau : Les aménagements hydrauliques, le transfert des eaux et la transformation des paysages de l’ouest

1.4. Les paysages de l’eau : Les aménagements hydrauliques, le transfert des eaux et la transformation des paysages de l’ouest


Les aménagements hydrauliques, le transfert des eaux et la transformation des paysages de l’ouest
Les aménagements hydrauliques des dernières décennies ont été très importants. Ils ont largement contribué à la transformation des paysages, urbains aussi bien qu’agricoles.

L’endiguement des ravines : transformation des paysages urbains

L’endiguement des ravines : l’exemple de la ravine Patate à Durandcliquez pour agrandir la photo

En 1957, le puissant chevelu des ravines de Patates à Durand, du Butor et du Chaudron, créent de fait une large coupure d’urbanisation entre Saint-Denis et les plaines agricoles du nord-est. En 1980, l’endiguement spectaculaire des ravines laisse Saint-Denis prospérer vers l’est et Sainte-Marie.

Avec la croissance de l’urbanisation, la place prise par les ravines est convoitée, d’autant que leur lit majeur est à sec et ne reçoit de l’eau qu’en cas de pluies cycloniques. Aussi endigue-t-on les ravines de façon radicale, réduisant les cônes d’épanchement des eaux à de simples filets tenus dans des lits artificiels en U bétonnés.
Le phénomène est vrai partout, particulièrement lisible à Saint-Denis qui endigue ses trois rivières du Butor, de Patate à Durand et du Chaudron, ainsi que leurs affluents. La place libérée est en général conquise par les équipements et zones d’activités.
Plus récemment la rivière des Galets a vu son champ d’expansion rétréci par la création de digues en épis, qui piègent les sédiments et laissent la savane conquérir ces espaces désormais hors d’eau.


L’irrigation : transformation des paysages agricoles

A partir des années 1960-1970, l’irrigation devient majeure dans la politique agricole. Elle s’opère désormais par des canalisations enterrées. Ce sont donc moins les ouvrages qui marquent le paysage que les effets même de l’irrigation, capable de transformer des pans entiers de territoires, grâce à de grands périmètres à vocation régionale : Bras de la Plaine 5 500 ha, Champ-Borne 1 800 ha, Bras de Cilaos 3 400 ha.
Rappelons que les rendements des exploitations sucrières passent de 50 t/ha/an sur terre non irriguée à 120 t/ha/an sur terre irriguée.


Irrigation de l’ouest : exemple à Saint-Gilles/l’Ermitagecliquez pour agrandir la photoTravaux d’irrigation vers Grande Ravine en 2005cliquez pour agrandir la photo


Le secteur de Grand Fond et de Boucan Canot, irriguécliquez pour agrandir la photoPremières taches vertes sur les pentes de l’Ermitage, juin 2000cliquez pour agrandir la photo

Savane et canne sur les pentes de l’ouest, juin 2000cliquez pour agrandir la photoChamps de canne récemment irrigués sur les pentes de l’Ermitage, soulignés par les andains de pierres de basaltecliquez pour agrandir la photo

Tapis vert déroulé dans la savane orangée des pentes de l’Ermitage, juin 2000cliquez pour agrandir la photoTapis vert déroulé dans la savane orangée de Piton Saint-Leu, juin 2000cliquez pour agrandir la photo

Les pentes de l’Ermitage irriguées et cultivées en canne : un paysage récent (photo février 2005)cliquez pour agrandir la photo

A l'heure actuelle c'est l'Ouest qui, depuis quelques années, vit une profonde transformation de ses paysages avec l'irrigation des terres des mi-pentes et des bas.


La savane du quartier du Portail à Piton Saint Leu en 1994, avant le basculement des eaux.cliquez pour agrandir la photoL’apparition de champs de canne à sucre sous le quartier du Portail à Piton Saint Leu après le basculement des eaux en 2010cliquez pour agrandir la photo

Les étendues sèches de savane plus ou moins arbustive cèdent peu à peu la place aux vertes étendues de canne à sucre. Le Conseil Général, avec des financements européens, met en œuvre l'ambitieux projet ILO (irrigation du littoral ouest) de transfert des eaux pour irriguer l'Ouest ; son coût est estimé à 855 millions d'euros (en 2009). Le principe consiste à capter de l'eau dans la rivière du Mât et dans la rivière des Galets et à les acheminer par canalisations enterrées sur l'Ouest. Plus précisément, les prises d'eau sur la rivière Fleurs Jaunes et sur le bras de Sainte-Suzanne, affluents de la rivière des Galets, sont reliées par un tunnel jusqu'au réservoir Mon Repos (cote 275), à partir duquel l'eau est distribuée sur l'Ouest en 8 antennes. ILO s'ajoute à une irrigation déjà assurée autour de Saint-Leu par des captages dans le cirque de Cilaos.

Les études, amorcées par le Conseil Général en 1983, ont conduit aux premiers travaux de creusement du tunnel de Mafate en 1989. A terme, les eaux devraient alimenter plus de 3 000 exploitations agricoles et irriguer un périmètre de 7 150 ha de terres cultivables dont :

  • 500 ha déjà irrigués, notamment par les ASA ASA (Associations Syndicales Autorisées)
  • 5250 ha entre les cotes 0 et 660 m
  • 1400 ha entre les cotes 660 et 800 m

ILO devrait permettre une augmentation de la production de canne à sucre de 300 000 t par an, soit 50 000 t de sucre. La production actuelle, de l'ordre de 200 000 t de sucre par an, est en effet inférieure au quota sucrier de La Réunion, fixé à 296 000 t. Le confortement de la filière canne - sucre - bagasse - électricité participera à la préservation de 15 000 emplois et des deux usines sucrières en activité.

Par ailleurs, le projet permettra une diversification rentable en maraîchage et arboriculture (20%) et en fourrage (5%).

Le transfert des eaux permettra en outre d'apporter un complément de ressource en eau pour cinq communes (Le Port, La Possession, Saint Paul, Trois Bassins et Saint Leu) comptant au total 180 000 habitants (25,5% de la population réunionnaise, données recensement 1999). Enfin il doit contribuer à la recharge de la nappe de la Rivière des Galets (9%)

L'arrivée de l'eau suppose une stricte protection des espaces à vocation agricole, dans un contexte de forte pression d'urbanisation. Aussi en 1992 le Conseil Général a demandé au Préfet d'établir un PIG (projet d'intérêt général) qui couvre les zones agricoles (NC) des documents d'urbanisme, soit 9 200 ha. Dans la zone PIG, les projets ne doivent pas entraver la possibilité d'établir le projet d'irrigation. A l'intérieur de ce zonage, les zones irriguées, définies par DUP (Déclaration d'Utilité Publique), sont inconstructibles ; elles représentent 7 150 ha et doivent être garanties jusqu'à 10 ans après la mise en service : soit 2023.

Malheureusement l'énorme projet ILO n'a pas été conçu comme un véritable projet de paysage et de territoire, articulant les espaces agricoles ou à vocation agricole créés par l'opération, avec les espaces urbains ou à vocation urbaine existants ou nécessaires. Seule une réglementation traduite en zonage a été élaborée, peu constructive, conduisant à des situations bloquées conflictuelles de positions entre zonages agricoles et zonages urbains. L'agro-urbanisme reste à inventer (voir les orientations ci-dessous).

Enfin, le paysage de l'eau a évolué récemment avec la multiplication des piscines privatives et, dans les Hauts, la création de retenues collinaires destinées à l'irrigation des terres.


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