Atlas des paysages de La Réunion




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Encart : L’urbanisme végétal : le défi d’une densité urbaine vivable


Urbanisme végétal traditionnel à Piton Saint-Leu.cliquez pour agrandir la photoJardin créole traditionnel à L’Entre-Deux : plein de plantes et abritant des ombrières.cliquez pour agrandir la photo

Case traditionnelle au jardin créole caractéristique : plein de plantes et généreusement ouvert sur l’espace public (Saint-André).cliquez pour agrandir la photo

Globalement, sur l'ensemble de l'île, le paysage urbain apparaît largement valorisé par les relations intimes développées entre le bâti et le végétal. Le phénomène est bien sûr plus marquant dans les parties les plus arrosées de l'île : est et hauts, où la palette végétale est la plus large. Cette relation est d'ordre culturel, développée en particulier à travers l'art des jardins créoles. « Le jardin est l'art supérieur de la civilisation créole », ont écrit M. et A. Leblond à propos des îles soeurs Réunion et Maurice. La passion des Réunionnais pour les plantes, qu'elles soient décoratives, alimentaires ou médicinales, les a toujours conduit à s'environner d'un univers végétal soigneusement composé :

  • les plantes à fleurs sur le devant de la case, côté espace public, bien visible, en accompagnement de la façade principale de la case la plus soignée,
  • les plantes utilitaires sur les côtés et par derrière, mêlées en une élégante « nature jardinée » à plusieurs strates, où se juxtaposent palmistes, arbres à fruits, arbustes et herbes,
  • l'ombrière pour les plantes de sous-bois les plus fragiles, fougères et orchidées notamment.

Bien souvent, à condition qu'on leur en offre la possibilité, les habitants font généreusement déborder leur jardin sur l'espace public.


Mariage fin et délicat des formes architecturales et végétales : symbiose (L’Entre-Deux).cliquez pour agrandir la photoAssociation des couleurs architecturales et végétales : symbiose (pharmacie des Lianes, hauts de Manapany.cliquez pour agrandir la photo

La fusion du végétal au bâti est confortée par les dispositions architecturales du bâti traditionnel :

  • la varangue apparaît ainsi comme la pièce la plus agréable de la case, à la fois abritée et ouverte au jardin, intermédiaire entre l'extérieur et l'intérieur ;
  • les motifs architecturaux et les jeux d'ombre qu'ils procurent contribuent également à marier la case au jardin : bardeaux, lambrequins, pilastres nervurés, s'accordent avec les feuillages, leurs découpes et leurs propres ombrages ;
  • enfin la couleur de la case joue traditionnellement avec celle du végétal : tons délicatement pastels pour les cases les plus nobles et les plus grandes, tons plus vifs pour faire ressortir les  cases les plus petites et modestes au sein de leur écrin végétal.

Au final, le paysage urbain traditionnel est largement valorisé par l'espace privé jardiné, pour le bénéfice de tous. Il est aussi un facteur important de lien social, par les échanges de plantes, de boutures, de fruits et de légumes, d'herbes et d'épices qui s'établissent entre habitants. Enfin il joue un rôle économique et social par l'occupation et le travail qu'il exige, et par l'apport de légumes, fruits et épices qu'il assure aux familles.


Case traditionnelle et végétation exubérante d’accompagnement, La Saline-les-Hauts.cliquez pour agrandir la photoDébordement du jardin de l’autre côté de la clôture, sur l’espace public de la rue (Le Tévelave).cliquez pour agrandir la photo

Exemple de bord de route jardiné par les habitants riverains, vers Ravine Sèche.cliquez pour agrandir la photo

Cette passion végétale se mesure aujourd'hui aux débordements de plantes constatées sur les balcons des habitants relogés dans des immeubles. En termes d'architecture, la capacité que l'on aura à offrir des espaces cultivables dans les logements individuels et collectifs adaptés à la civilisation végétale Réunionnaise apparaît ainsi comme un défi.


Urbanisme végétal, au Port.cliquez pour agrandir la photoLa Chaussée Royale requalifiée à Saint-Paul (paysagiste agence Folléa-Gautier).cliquez pour agrandir la photo

En termes d'urbanisme, cette civilisation végétale est appelée à passer de la sphère privée à la sphère publique, au fur et à mesure que les centres-villes se structurent, se densifient et se substituent aux quartiers traditionnels.
Faute de cette prise en charge, des quartiers excessivement minéralisés sortent de terre, posant des problèmes d'environnement urbain : perte de l'ombrage rafraîchissant et aéré des arbres, durcissement du cadre de vie, imperméabilisation des sols, pollutions.
La ville du Port a depuis longtemps montré une voie, fondant son projet urbain sur une trame d'espaces de circulation généreusement plantés et ombragés. Plusieurs projets urbains contemporains continuent désormais dans cette voie : boulevard sud à Saint-Denis, bord de mer à Saint-Pierre, Chaussée Royale à Saint-Paul, …


Cocotiers dans une rue de Saint-Leu.cliquez pour agrandir la photo

Le végétal, pour garantir son mariage fusionnel avec le bâti, peut également servir d'étalon aux hauteurs de bâtiments admises. Ainsi, certaines villes littorales comme Saint-Leu ont limité la hauteur des bâtiments à R+3 pour les accorder avec celle des cocotiers d'âge adulte.

Sur les pentes, les fractionnements des volumes bâtis pour s’adapter à la déclivité sont autant d’occasion pour favoriser l’imbrication du bâti et du végétal. Enfin la valeur économico-sociale du jardin devrait progressivement conduire les décideurs à offrir des jardins familiaux créoles aux familles logées en appartements.



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